Au loin, je vois..... Des navires dorés ?!

Des bulles par-ci, des bulles par-là... Mais il allait arrêter de bouger oui?! A chaque fois que la jeune femme pensait enfin l'avoir trouvé, elle plongeait la main et puis rien, juste d'autres bulles plus loin. S'il cherchait à la calmer, c'était loin d'être le cas. Il ne faisait qu'empirer la situation.

~ Paresseux! Arrête de jouer à cache-cache et montre-toi sur le champs! ~

Mmh... Jamais elle n'aurait pensé que sa demande serait exaucé aussi vite. Il n'y avait plus aucun indice à la surface de l'eau, plus aucun mouvement, plus une bulle. S'inquiètant légèrement, elle se calma d'un coup. Qu'est-ce qu'il avait pu encore faire celui-là?

~ ...Kellran? ~

... Bon, c'était bien la dernière fois qu'elle s'inquiétait pour cet idiot. Kanone sentit le paresseux se dresser dans son dos. Gloups... Pour une surprise... Mais le pire restait à venir. Les mains du jeune homme vinrent entourer le ventre de la malheureuse et la tirèrent en arrière. Oh non...

*Tout mais pas ça.*

Il ne fallait pas rêver non plus. Ce qu'elle craignait arriva. Les comiques plongeaient dans l'eau. Encore étonnée, elle ne ferma pas les yeux, se laissant enfoncer dans les profondeurs de la mer. Arrivés vers le fond, Kellran se décida enfin à la lâcher et remonter.

*Je vais le....*

Suivant son ami, elle refit surface, tête baissée, en face du futur mort. Là, il allait en baver. Maintenant... Qui plaindre le plus? Sûrement le souverain d'Egypte. Bref, l'impératrice posa ses mains sur les épaules du suicidaire et releva la tête brusquement.

~ JE VAIS TE TUER!! ~

Kanone avança ses mains vers le cou de son ami mais se stoppa, non pas avec facilité, et soupira. Il venait d'éviter l'étranglement. Cognant l'arrière du crâne de Kellran, elle croisa les bras, bien énervée. Il avait la possibilité entre se faire égorger ou être sauf.

~ Donne-moi une bonne raison pour que je ne t'assassine pas. ~

Une seule raison? Mmh... En gros, il n'avait plus qu'à faire sa prière et son testament.

Kellran afficha une expression de pur étonnement, comme s'il disait
"mais qu'est-ce que j'ai fait?".
Bien sûr, il savait pourquoi Kanone était si remontée contre lui, et bien entendu, il était très fier de sa petite taquinerie.
Gamin un jour, gamin toujours, telle pouvait être sa devise, il resterait un jeune garçon dans l'âme.
Maintenant, il imitait l'effroi, la peur d'être haché menu:

- Mais... mais... tu n'oserais pas?

Il éclata ensuite de rire. Non vraiment, il pouvait être ridicule en imitant une émotion qu'il ne ressentait pas.
Ah mais par contre, il se perdit ensuite dans une réflexion bien visible, due à la phrase suivante de Kanone.

*Une bonne raison... mmmmmh*

Etant un sale petit garçon horriblement turbulant et fatiguant, il ne pouvait rien dire pour sa défense. Etait-il destiné à mourir sous les terribles coups de l'Impératrice romaine? Horrible destin, vraiment...

*Au moins, je mourrai tué par une femme magnifique* se dit-il, recommençant avec ses pensées dignes de lui attribuer une baffe.
*Oh... mais...*

Ca y est, quelle terrible idée venait de lui traverser l'esprit? Baissant la tête, le jeune homme affectionna une expression apeurée. Pour un peu, Kanone aurait cru voir des larmes perler au bord de ses yeux.
Bien entendu, il ne pleurait pas, ce n'était pas son genre. En réalité, il imitait cette expression timide et gênée d'un garçon fautif ayant atrocement honte.

- Je suis désolé, je ne voulais pas t'énerver...

Sa voix, faussement tremblante, était aigue et chevrotante comme celle d'un enfant. Non vraiment, quel comédien.
Il releva la tête. Et hop, la lueur de malice dans son regard. Kanone pouvait bien trembler.

- Si je dois mourir de ta main...

Il s'approcha, doucement. Comme au ralenti, comme ces terribles scènes remplies de suspense, il avançait, projetant de l'eau sur les côtés de ses jambes, avec un bruit d'éclaboussure.

- Autant finir de manière agréable, en beauté...

Il sortit les mains de l'eau et les posa sur les joues de l'Impératrice.
Vous vous doutez déjà de son geste, de la suite.
Il s'approcha encore, jusqu'au moment où ses lèvres joignirent celles de Kanone. Deuxième fois qu'il osait, deuxième fois qu'il montrait à la fois sa faiblesse d'humain et ses sentiments.

Kellran baissa la tête, un air de fautif en pleurs sur le visage, presque peureux. Kanone soupira. N'importe quoi. A force de le voir et d'être à ses côtés, elle avait fini par le connaître un peu mieux. Il jouait sûrement. Et quand il s'excusa, elle faillit éclater de rire.

*Drôle de raison.*

Toutefois, cette petite comédie s'acheva bien vite, laissant place au vrai visage du Pharaon: Le farceur de première. Oh oh... Coup fourreux pas loin. L'impératrice recula d'un pas. S'il devait mourir?

*Quoi?*

Il s'avança, refermant la distance qui les séparaient, et posa ses mains sur les joues de la jeune femme... Finir en beauté? Elle comprit ce que voulait faire Kellran. Essayant à nouveau de faire un pas en arrière, en vain, ce qui devait arriver arriva.

*.... Non...*

Comment... Avait-il osé l'embrasser de nouveau? Il n'avait pas honte?! Et pourtant... Celui-ci dura un peu plus longtemps que l'autre, quelques secondes de plus. Pourquoi? Parce que Kanone se posait mille et une question à nouveau. Allez, maintenant, ça suffisait.

~ .... ~

La romaine mit fin au baiser et leva une main menaçante qui ne tarda pas à s'abattre, atterrissant avec brutalité sur la joue du jeune homme. Pour peu, il aurait bougé de côté. Bref, passant son poing sur ses lèvres, l'autre refermer contre sa poitrine, elle baissa la tête, encore.

~ .... Je t'interdis... ~

Mmh? Qu'est-ce qu'y lui arrivait?

~ Je t'interdis de jouer avec moi comme ça. ~

Ow... Ce n'était plus de la colère à ce stade, mais... De la peine? Non, là, cela n'allait plus du tout. Mais vraiment plus.

~ Je hais les gens... Qui se fichent des autres. ~

Vraiment blessée sur ce coup-ci... Incroyable. Mais une question devait se poser, celle qui ne passa pas tout de suite dans l'esprit de la jeune femme: Quelles raisons l'avaient poussé à agir ainsi? Mais bon, vous savez... Ce n'est pas la première chose qui vient à la tête dans une situation pareille.

Kellran recula, fermant les yeux.
La claque? Oh oui, il l'avait bien prise, c'était le cas de le dire.
Le noir de la nuit cachait maintenant une belle marque rouge sur sa joue gauche.
Et pourtant il ne semblait pas souffrir, du moins, pas physiquement.
Détournant la tête d'un quart, il serra les poings, alors même que ses paupières s'obstinaient à rester fermées.
Qu'essayait-il de contenir? De la rage? De la peine? De la honte?
Peut-être un peu des trois...
Ouvrant doucement les yeux, ceux-ci étaient rouges, comme s'il avait pleuré pendant des heures. Etait-ce encore l'effet de l'eau salée? Normalement, ca aurait déjà du se dissiper depuis quelques minutes.
Sa voix s'éleva, faible et triste:

- Je n'ai pas pour habitude de me moquer des personnes que j'apprécie...

Levant les yeux vers elle, Kanone put voir leur rougeur qui empirait de seconde en seconde. Maintenant, même ses pupilles devenaient d'un noir rougeatre, avec deux pointes enflammées au fond des ténèbres.

- Surtout sur un sujet aussi sérieux.

Ses cheveux, à demi-secs, encore rugueux du contact avec la mer, tombèrent devant son regard, le cachant à la jeune femme au moment même où il lui tournait dos.
Etait-ce de la vapeur qui se dégageait maintenant, faible nuage blanc transparent qui entourait le Pharaon comme une barrière.

- Sans doute est-ce de ma faute... peut-être que je n'ai pas l'air de prendre quoi que ce soit au sérieux.

Il revint vers la plage, quittant l'eau pour le sable qui tacha ses sandales de cuir, qui colla au bas de son pantalon. Etrangement, ses vêtements paraissaient secs. Bizzarerie en rapport avec la vapeur entrevue plus tôt? Qui sait. Le Pharaon leva le regard vers le ciel, un pauvre sourire aux lèvres, le regard brillant.

- Les étoiles aussi sont des déesses. Isolées des hommes et de la souffrance, elles peuvent s'adonner à d'autres occupations que la guerre et la politique. Elles peuvent rêver, et rire, être heureuses.

Son poing droit s'illumina de couleurs rouges et jaunes, tranchant avec les ténèbres nocturnes. Pour un peu, on aurait cru qu'il s'était transformé en une torche.
Baissant la tête, de dos à Kanone, à demi-voûté, il tremblait de tous ses membres.

- Né pour survivre !! Né pour survivre !! J'aurais du y penser, il n'y a aucune place pour le bonheur dans cette vie !

Et dans un brusque accès de colère, il frappa l'air de son poing, dirigé vers la droite. Un jet de flammes apparut, comme sorti d'entre les doigts du Pharaon. Il souffla l'air aux alentours, illuminant la nuit d'un éclat sanglant.
Lorsque les flammes se dissipèrent, le sable victime de la chaleur s'était transformé en verre soufflé.
Kellran lui, partait en direction du village.

La jeune femme releva d'un coup la tête vers Kellran. Sa voix... Il semblait... Triste? Non... Mais pourquoi le serait-il? Ouh... Une pensée traverssa l'esprit de l'impératrice: Et si... Mais dès qu'elle croisa son regard, elle baissa aussitôt la tête. Honteuse à présent? Ou... Serait-ce à cause de ces yeux rouges?

*Sérieux...?*

Sa gorge se resserra brutalement. Il était vraiment sérieux... Et elle l'avait traité de "sans-coeur" qui se fichait des sentiments d'autrui... Oh la gaffe. Très grande gaffe. D'autres paroles suivirent. Kanone tenta bien de répliquer, sans réussir pour autant. Sa gorge était si sèche malgré l'eau qui l'entourait qu'elle n'arrivait à prononcer aucun mot, ni même son. Et il s'éloigna, elle le sentait. Il avait dû atteindre la plage maintenant.

~ Ce n'est pas de ta faute... Mais la mienne. ~

Ah non! Elle n'allait tout de même pas verser des larmes! Ah.... Elle faillit mais les garda pour elle. En ce moment, quelque chose attirait son regard au point de l'empêcher de pleurer. Des reflets rougeâtres apparaissaient à la surface de l'eau. Déviant les yeux vers la plage, elle manqua de peu la crise.

*Kellran?!*

Ok... Le Pharaon possèdait un caractère... Enflammé disons. Mais de là à vraiment prendre feu! C'était du n'importe quoi. Kanone se dépécha de faire quelques pas vers la plage. Cependant, deux pas et la voilà stoppée.

*Qu'est-ce que... C'était, ça?*

Les flammes partirent dans l'air et Kellran s'en alla, en direction du village. Il fallut un moment à la pauvre femme pour se remettre de son choc et de sortir hors de l'eau, totalement trempée des pieds à la tête. C'était bien parti pour un rhume.

~ Génial... ~

Soupirant, elle se tourna vers la mer et se laissa tomber sur le sable.

~ Aie! ~

Tiens? Kanone venait de cogner sa main gauche contre quelque chose de dur. Curieuse, elle examina les horizons.... Ah... Ce n'était que du verre.

~ DU VERRE?! ~

Secouant la tête de gauche à droite, elle resserra sa main dans l'autre, soufflant.

*Heureusement que ce n'était pas coupant... Sinon, un peu plus est...*

Vous ne vous êtes jamais demandé pourquoi la romaine portait toujours soit son bouclier, soit un bracelet large à son poignet gauche? Vous connaissez Achille? Bien, je crois que vous avez compris. Peu-être moyennent mais, c'est déjà ça. Bref, se couchant sur le sable en ignorant les grains qui se collaient à elle, la jeune femme admira les étoiles, silencieuse.

*Le paresseux... Qu'entendait-il par "sérieux"? Serait-ce...*

Quelques petits souvenirs passèrent dans son esprit en flash back. Se relevant brusquement, elle s'engueula quasiment elle-même.

~ Non non non! Arrête de penser à n'importe quoi. ~

Se relevant, elle frotta légèrement son bras droit avec sa main gauche.

~ Ce sentiment de culpabilité... Je le connais que trop bien... ~

Inspirant profondemment, elle entreprit de retrouver le jeune homme et de s'excuser pour tout à l'heure. Elle n'aurait jamais dû lui parler ainsi et encore moins le giffler. C'était parti pour une course. Elle s'en alla à toute vitesse vers le village, espérant trouver le Pharaon très bientôt.

Bon, Kellran n'aurait pas du se laisser emporter comme ça, c'était certain...
Il avait manqué de sang-froid, mais quoi de plus normal, il possédait un caractère bouillant.
Il regrettait déjà sa réaction, mais il était trop tard pour reculer. Kanone n'était plus dans son champ de vision, tout comme la plage.
Maintenant, il marchait le long d'une ruelle sombre, en direction du port, là où était amarré son navire.
Plusieurs fois, il lui sembla entendre des pas derrière lui, mais il avait beau se retourner, il ne voyait que des ombres.
Haussant les épaules, il arriva enfin au bateau. Le Général l'attendait, un air anxieux sur son visage ridé par la guerre et les souffrances.

- Il me semblait bien que j'avais entrevu le feu d'Horus. Que vous est-il arrivé?

Kellran fit un geste de la main, signifiant que ce n'était rien. Le Général vit rapidement l'expression de tristesse à demi-dissimulée sur le visage de son souverain. Il devina alors que cela avait un rapport avec la jeune femme romaine. N'insistant pas, il attendit des ordres qui tombèrent comme un glas funèbre.

- Levez l'ancre, nous partons. Ma mission ici est terminée.

Détournant obstinément les yeux, il attendit que le haut-gradé se soit éloigné pour regarder en direction de la plage, que l'on voyait au loin. Plus personne, à ce que le souverain pouvait en voir.
Soupirant, il ferma les yeux et entendit le Général donner des ordres aux marins. Ses mains se crispèrent au rebord du pont supérieur.
Heureusement qu'il n'avait pas du retourner à l'auberge, vu qu'il gardait toujours toutes ses affaires sur lui. Il se demanda si Kanone y était, en train de le chercher, ou alors...

*Oublie, c'est terminé...*

Il secoua la tête et sentit les secousses du navire qui commençait enfin à bouger. D'ici quelques jours, ils seraient de retour en Egypte, et tout serait terminé.

*Mais où est-il bon sang!!*

Cela faisait un moment qu’elle courrait telle une dératée, errant de ruelles en ruelles, à la recherche du Pharaon. Qu’est-ce qui lui avait pris de partir? Et encore… Avec toute cette obscurité, elle aurait très bien pu passer à côté de lui sans le voir…

~ Kellran! Kellran!! ~

Elle l’appelait encore et toujours, sans recevoir une quelconque réponse de sa part. Non mais! Où s’était-il encore fourré celui-là? Désespérant de ne pas réussir à le retrouver, elle se décida enfin de faire un tour vers l’auberge.

*Peu-être qu’il est retourné dans sa chambre pour se reposer.*

Ne s’attardant pas un instant de plus, elle fila à la bâtisse, évitant ici et là une belle chute. Arrivée, Kanone entra en trompe et escalada deux à deux les marches de l’escalier menant à l’étage où se trouvaient les chambres. Numéro….

*Numéro, numéro…. !! 7, numéro 7!*

S’approchant doucement de la porte, totalement essoufflée, l’impératrice examina de plus près cette fameuse porte. Oh! Une clef! Alors peu-être était-il vraiment là? Elle poussa l’entrée et s’engouffra à l’intérieur.

~ Kellran!! … Quoi? ~

…. Par ici. Soupirant et se laissant tomber sur le lit, la jeune femme ferma les yeux et réfléchit un instant. A part l’auberge, où pouvait-il encore aller? Oh pitié… Se relevant brusquement, elle s’en alla à la course, comme toujours.

~ Oh non pitié! ~

Quelle révélation avait bien pu traverser l’esprit de la romaine? Entre temps, elle fonçait comme une flèche en direction… Du port? Ne me dites pas… Mais en y pensant, c’était le seul lieu que le paresseux connaissait. Là où tout avait commencé: Le port où l’attendaient ses deux navires.

*Pitié pitié pitié pitié….*

Toutefois… Le pire arriva. Kanone termina sa course folle sur le pont en bois, manquant de peu de tomber dans l’eau, s’agenouillant pour éviter de passer par-dessus. Au loin, on pouvait distinguer deux navires, deux bateaux dorés. Ceux du Pharaon.

~ Kellran!! KELLRAN!!! ~

A force d’hurler, elle allait finir par perdre sa voix. Mais bon, comprenez là. Cet idiot s’en allait ainsi, sans un mot, comme un voleur. Reprenant le maximum d’air, elle cria de toutes ses forces, de tous ses poumons le nom du Pharaon…. Mais aucune réponse… Rien du tout.

~ …. ~

*Idiot.*

Le temps passa, lentement. Puis elle se releva et retourna à l’auberge, pour se reposer. Dans peu de temps, un long voyage l’attendait, pour rentrer à Rome. Comme si de rien était. A un point près.

*On se reverra sûrement. Pour que je puisse lui tirer les oreilles.*

…. Toujours le mot pour rire. Bref… Fin de l’histoire en Espagne…